Une relation sadomasochiste avec un arbre est le point de départ impromptu d’une enquête qui relie érotisme, violence et écologie.
L’envie de raconter une expérience particulière avec un arbre donne lieu à un cycle de chansons – chansons de multiples formes, chantées, gueulées, dansées. On pourrait assimiler Deep Cuts à une pastorale, cette forme bucolique de nouveau en vogue à l’ère Romantique quand la révolution industrielle posait des questions urgentes sur l’exploitation des ressources. Sans moralisme, cette pastorale du XXIème siècle se veut un moment de contemplation de la violence dans nos relations avec nos écosystèmes.
Un jour, lors d’une promenade dans une forêt de pins, je me suis mis à frapper une branche contre le tronc d’un arbre. Cette action me mettais dans un état qui m’est familier, mais pour lequel nous n’avons peu de mots – un état entre joie, colère, une sensation de ma propre puissance au regard de ma capacité à agir avec le monde physique. C’est une sensation que je retrouve souvent quand je me balade en nature, que j’expérimente aussi sur la piste de danse, ou dans un combat de lutte. Il me semble c’est un état de corps pour lequel nos langues sont pauvres et à juste titre – c’est une sensation que s’exprime mieux en dansant, en chantant, en gueulant.
Pendant que je répétais ce geste j’ai été touché par sa similitude avec la flagellation, surtout en tant que pratique consentie de BDSM, quelque chose que je pratiquais aussi avec des humains à cette époque. Étant soudainement en contrat sadomasochiste avec un arbre, je commençais à réfléchir sur la relation entre l’érotique et la violence dans nos articulations écologiques plus vastes. Les humains dans le capitalocène sont imbriqués avec la Terre par une multiplicité de biais – un amour profond, une dépendance matérielle, la violence basique d’exister dans une chaine alimentaire, et l’horrible violence de l’extraction sans entrave. Je me demandais si cette sensation d’érotisme violent que j’ai éprouvé en frappant cet arbre pourrait être un filtre à travers lequel je pourrais scruter les relations entre les humains et leurs écosystèmes.
Bryan Campbell est un artiste américain qui vit et travaille à Paris. Depuis 2008, il élabore un travail multi-disciplinaire mêlant l’image, le graphisme, le texte, et la chorégraphie. Ses performances manient les codes de la culture visuelle en s’attachant aux corps et cognitions qu’elle implique et qui en sont issus. Ses projets sont subtilement queer, aventureux en concept, et beaux. Après des études à la Tisch School of the Arts de l’Université de New York, et à la Salzburg Experimental Academy of Dance (SEAD), Bryan Campbell crée plusieurs pièces à New York, notamment une série de solos Seven Activities of the Historical Object, et le quatuor Hares on the Mountain, une commande du festival La MaMa Moves!.
En tant que danseur, il est, entre autres, engagé dans les projets de Christopher Williams, David Parker, Sydney Skybetter, et Gus Solomons jr. Sur la session 2009/2010, il intègre EX.E.R.CE, un programme de formation et de recherche sous la direction de Mathilde Monnier au Centre Chorégraphique National de Montpellier. Durant cette période, il initie une recherche autour du dessin animé Mon Petit Poney, et réalise, à partir de là, la conférence/performance Research for the quadruped protagonist, ainsi que la pièce Quadruped Protagonist. Les présentations de ces pièces ont fait voyager les poneys au Théâtre de la Cité Internationale (Paris), à Beursschouwburg (Bruxelles), au Judson Church (New York), au GogolFest (Kiev), au KUNSTKOMPLEX (Wuppertal) et au festival La [Déca]danse (Vanves). Parallèlement, Bryan Campbell poursuit son travail d’interprète auprès de chorégraphes en collaborant, entre autres, avec Loïc Touzé, Jana Unmüssig, et Emmanuelle Huynh. En 2011, il reçoit une bourse de recherche du NRW Kultursekretariat (Wuppertal) pour travailler autour de l’œuvre de l’artiste Dieter Roth. En 2013, il reçoit la bourse DanceWEB. En 2015, Bryan Campbell crée MARVELOUS, résultat d’une période de recherche de trois ans autour de la dramaturgie de l’imprimé. Ce projet, à la fois magazine de mode et culture et performance, est “publié” dans des espaces divers (théâtres et galeries) et a été présenté àPACT Zollverein (Essen), Kaaistudios (Bruxelles), le Festival Artdanthé (Vanves), Actoral (Marseille), aux Latitudes Contemporaines(Lille) et au festival d’Uzès.
En 2019, il crée SQUARE DANCE, un quatuor qui questionne les schémas des relations sociales en puisant dans les dynamiques de pratiques de danse « de société » à travers la square dance américaine. Ce projet a été présenté : au Gymnase – CDCN Roubaix, à la Raffinerie à Bruxelles et au Centre national de la danse (Pantin). Il travaille actuellement sur Janitor of Lunacy: a Filibuster, un monologue longue durée inspiré d’une d’obstruction législative du Sénat américain, le filibuster.
Bryan Campbell est récemment engagé en tant que danseur pour les projets d’Olivia Grandville, Jocelyn Cottencin, Ambra Senatore, Perrine Maurin et Antonija Livingstone & Jennifer Lacey, pour les récréations des Inconsolés d’Alain Buffard et de Sorry, do the tour! de Marco Berrettini, et en tant qu’assistant à la conception d’un projet de Jacob Peter Kovner. Il participe actuellement aux créations de DD Dorvillier, Gaëtan Rusquet, et Marco Berrettini. Il est membre du collectif dance for plants. Sa traduction en collaboration avec Vincent Weber des Poems d’Yvonne Rainer sort en avril 2021 aux éditions Trente-trois morceaux. Les projets Bryan Campbell sont accompagnés par Météores en production, développement et diffusion.
Conception et performance : Bryan Campbell
Création Lumière : en cours
Régie générale et son : Diane Blondeau
Création musicale : en cours
Regard extérieur : Katerina Andreou
Production déléguée : Météores
Production/diffusion : Sandrine Barrasso
Administration/ production : Charlotte Giteau
Photographe : Hannu
Coproduction (en cours) : Agora / Montpellier danse
Avec le soutien de Atelier des Marches – Le Bouscat (33), CNDC Angers, Le Pacifique CDCN Grenoble Auvergne Rhône Alpes, SUBS Lyon