Biographie
Guilhem Chatir, est né en 1993 à Toulouse. Il commence par se former en hip hop et en cirque puis poursuit son parcours au Conservatoire Régional de Toulouse. En 2010, il entre au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris. De ces années il en profite pour créer des pièces de courtes durée aux ateliers chorégraphique et pour participer à la création sacrée printemps de Cristiana Morganti.
En 2013, il intègre l’école d’Anne Teresa de Keersmaker P.A.R.T.S. Il y apprend les répertoires de chorégraphes tels que Trisha brown et Rosas.
En 2015, il rejoint la compagnie Ultima Vez de Wim Vandekeybus pour une reprise de rôle dans What the body does not remember et en novembre 2015 il commence le nouveau répertoire de la compagnie In spite of wishing and wanting.
En 2017, il débute une nouvelle collaboration avec Lali Ayguadé sur le trio Here.
Résidence — NiNi Ya MoMo
Ni ni Ya Mo Mo, c’est une comptine qui m’a vu grandir. Une comptine arabe. C’est
aussi la première chose à laquelle je pense lorsque j’essaie de me souvenir de ce que m’a légué mon père. Un souvenir radicalement transparent et intime.
Par amour pour ses enfants et dans un souci d’intégration, il a enfoui une grande
part de sa culture arabe – qui ne m’a alors pas accompagné dans mon trajet vers l’âge
adulte. J’ai la sensation que les reliefs et les aspérités ont été aplanies, que les marqueurs culturels avec ce pays d’origine n’étaient pas affirmés, du moins jamais revendiqués.
Mais, aussi anodine que la berceuse puisse paraître, elle livre davantage que le
caractère insondable des liens filiaux. La berceuse, à travers sa dimension vive et figurée, contient tout un patrimoine ; l’acte de la réciter achève de transmettre cet héritage. Processus de transmission poétique, elle est profondément liée au territoire dont elle provient. Elle se goûte avant de prendre sens. Elle accompagne ce basculement du monde extérieur vers l’univers intérieur. La voix est vectrice de quelque chose qui échappe à la signification : elle est la continuité sonore et enveloppante d’une proximité corporelle rassurante pour l’enfant qui ferme les yeux et s’efface au monde.
Je partage avec mes partenaires au plateau Jamil Attal et Karima El Amrani, une
correspondance des origines, des influences et un héritage parcellaire commun qu’il
m’intéresse d’aller interroger pour en faire exister toutes les déclinaisons et toute la
richesse. Se profile avec eux une entreprise d’enquête anthropologique afin de déterrer ces musiques, ces danses, ces architectures de corps qui m’ont été transmises. Elles contiennent aussi nos histoires, singulières et communes, et des parts de nos identités, loin d’être invariantes, immuables et intangibles.
Libérer les corps à la faveur de la nuit. Ni ni Ya Mo Mo embrasse le crépuscule.
Celui qui permet les correspondances insolites, l’éveil paradoxal des souvenirs endormis, la jouissance physique de participer à une célébration désinhibée – qu’il s’agisse de nos transes festives ou du bal de nos imaginaires.
Je ne raconte pas le Maroc, je ne dépeins pas sa culture ; j’empoigne enfin les
traces qu’elle m’a laissées à partir et à travers un souvenir singulier, parfaitement universel : le moment du coucher et ses rituels, les comptines qui nous ont bercés, les mondes oniriques absurdes que nous avons traversés.